Article 5 - Les visites et les premières observations

Bonjour à tous ! 
Prêts pour un peu de lecture ? Vous êtes sous la couette dans le canapé avec une tisane bien chaude ? Rassurez vous, chez moi il ne neige pas (mais dans les montagnes il fait très froid) !

Alors, comme je vous l’avais dit, ce mois de novembre a été très chargé. J’ai réussi à visiter 9 programmes  de parrainage, puis je suis allée au Cambodge, à Siem Reap. J'ai eu 5 jours de pause durant lesquels nous avons eu la course dans les temples d’Angkor. Ce fut donc un mois très sportif.
La course dans les temples a vraiment été magique ! 10 000 personnes étaient inscrites, et nous étions 4000 dans mon épreuve de 10 km. J’ai terminé 2300ème, et je suis contente car cela a été très dur pour moi, je n’aime pas courir ! La ville de Siem Reap est très belle, et les Cambodgiens sont vraiment un peuple très gentil et accueillant. Ils sont très différents des Thaïlandais, car en effet, si le fait de garder la face est un concept très Asiatique, en Thaïlande, il est crucial. Ainsi, j’ai remarqué que les Cambodgiens montraient plus leurs sentiments et cachaient moins leur pauvreté que les Thaïlandais. Mais j’ai passé 5 jours supers et voici quelques photos, prises par mes soins, qui en témoigneront.





Avant de partir, j’ai visité 9 programmes de parrainage dans ma zone d'action. Ma moto a encore été ma meilleure amie puisque nous avons fait plus de 500 km. J'ai pu visiter 3 foyers et 6 écoles dans lesquels nous parrainons des enfants. Mes visites ont toutes été très différentes, autant sur l’accueil, que sur les activités que j’y ai faites, que sur le comportement des enfants ou des responsables ! Tout d’abord je vais vous expliquer comment fonctionnent les foyers et les écoles ici, ensuite je vous raconterai mes visites, et enfin je vous expliquerai mes observations et sur ce quoi j'aimerais travailler pour la suite.

La gestion des foyers est confiée à un père et deux sœurs, assistés par deux catéchistes (une fille et un garçon) qui s’occupent des enfants. Les foyers accueillent des enfants dans des situations différentes : soit les parents sont trop pauvres pour s’en occuper, soit ils travaillent trop afin de gagner un minimum vital et n’ont donc pas de temps. Il y a aussi certains enfants dont les parents sont décédés ou dont la situation chez eux est trop compliquée : parents malades, alcooliques, violents... 
Les foyers sont financés par le diocèse, le peu que peuvent donner les parents des enfants, les dons lors de la messe du dimanche, et l’aide d’Enfants du Mékong. De plus, les foyers essaient de subvenir le plus possible à leurs besoins par leurs propres moyens : en général, ils entretiennent un très grand jardin avec des légumes et des fruits, ils élèvent des cochons et des poules, et dans certains cas des oies ainsi que des poissons dans les étangs. Les frais sont donc ainsi minimisés. 
Dans les foyers, les sœurs sont toutes adorables : elles me chouchoutent ! Les pères sont des hommes courageux et admirables, mais ils sont très occupés et parfois je trouve qu’ils « planent » un peu. Au niveau des programmes Enfants du Mékong, la gestion des papiers et de la compta est assez catastrophique. Ils délèguent souvent aux sœurs qui ne parlent pas un mot d’anglais et qui ne comprennent donc pas les papiers ce qui est très compliqué. Cependant, les pères connaissent tous les villageois, la situation de toutes les familles et des enfants, il y a donc un super suivi, et lorsque j’ai besoin d’une information, ils savent me répondre ou peuvent m’obtenir la réponse rapidement.
Dans les foyers, les enfants sont très bien traités et mangent à leur faim. Ils vivent dans de bonnes conditions comparées à chez eux, et ils sont heureux. Cependant, je trouve que la vie qu'ils mènent est très dure et que les équipes de sœurs et catéchistes peuvent être très sévères : cela dépend vraiment des foyers. 
Un bilan assez positif donc, même s’il reste encore beaucoup de choses à améliorer. Mon but dans un futur proche : tout mettre à jour au niveau des papiers, tout expliquer de nouveau aux pères et aux sœurs, et définir des rôles clairs pour la gestion du programme. 
Mon but dans un futur éloigné : mettre en place la charte pédagogique Enfants du Mékong. En effet, j'ai remarqué que l'éducation des enfants pouvaient être bancale dans les foyers. Ils apprennent à vivre en communauté et à gérer les problèmes du quotidien : cuisine, élevage des animaux, activités manuelles, tissage pour les femmes... Cependant, ils n’apprennent pas du tout a avoir des responsabilités, à se débrouiller seuls, et à s'ouvrir sur le monde... Les volontaires pourraient donc mettre en place de nombreuses activités afin de remédier à cela. J’espère que j'en aurais l'occasion, mais pour l'instant, il faut déjà tout remettre en place.

Dans le cas des écoles, cela est très différent, et très compliqué car le système scolaire thaï est un véritable casse tête. Les grandes écoles, en ville principalement, sont directement soutenues par le gouvernement : elles sont appelées école mères. Les petites écoles de montagne, éloignées des villes, sont appelées « écoles filles ». 
En théorie, les écoles mères doivent verser une partie de leurs subventions aux écoles filles, mais cela n'est malheureusement pas systématique. En effet, parfois, certaines écoles filles ne reçoivent pas les fonds, ou alors partiellement. Seuls les professeurs diplômés sont payés directement par le gouvernement. Toutes les autres dépenses (salaires supplémentaires, eau, électricité, nourriture, matériel...) doivent être prises en charge grâce aux fonds "envoyés" par les écoles mères. Dans certaines écoles, le gouvernement n’envoie que 2 professeurs alors qu’il en faudrait 3 ou 4. L’école doit donc payer 1 ou 2 professeurs en plus, par ses propres moyens. En général, une mère d’élève est aussi employée pour cuisiner tous les midis pour les centaines d’enfants de l’école, en échange d’un petit salaire que l’école essaye tant bien que mal à lui donner. 
Le peu de fonds apportés par le gouvernement est donc insuffisant, et comme dans les foyers, les écoles essayent de minimiser au maximum leurs dépenses. J’ai ainsi pu remarquer que les élèves sont souvent en charge de l’entretien et du ménage de leur école, mais aussi de l’élevage des cochons qui sont souvent vendus (ou parfois mangés) pour obtenir des fonds en plus. 
De nombreuses de ces écoles ont donc besoin d’énormément de soutien, apporté par Enfants du Mékong (mais aussi par d’autres ONG que je découvre au fur et à mesure: une allemande et une australienne pour le moment). 

Une des écoles dans lesquelles nous avons un programme de parrainage est fascinante : le directeur et l’équipe de professeurs sont incroyables ! C’est une école, perdue en plein milieu de la montagne, dans laquelle nous avons une vingtaine d’enfants parrainés, sur 300 élèves. Les enfants viennent des 6 villages alentours, villages très très pauvres. Par exemple, un des villages n’a pas d’eau environ 2 mois par an, information que j’ai transmise au siège afin de voir si nous pouvions faire quelque chose. J'ai aussi pu voir un soir un homme réparer sa moto à la bougie car il n’avait pas d’électricité chez lui. Les enfants vont à l'école et rentrent le soir, à pieds : certains marchent 15 km dans la journée. C’est aussi dans cette école que quelques élèves restent dormir la semaine car leur village est à 30 km. Ils rentrent donc à pieds le vendredi après midi, et reviennent le dimanche après midi à l'école. 




Malgré cette situation, c'est la meilleure école que j'ai vu que pour le moment. Le directeur est incroyable et fait tout pour donner une bonne éducation aux élèves qui permettra de changer à long terme la situation dans leurs villages. 

Tous les matins avant le début des cours, les élèves ont des activités de 30 min avec les professeurs : lecture de journaux, yoga, exercices de concentration,  ou encore questions de culture générale ! Ensuite, le jeudi après midi, les élèves n’ont pas cours et doivent chacun choisir un « atelier » : cuisine, sport, lecture, bricolage... Le directeur met tout cela en place afin de développer leur ouverture au monde et leurs compétences. L’école est connue dans toute la région grâce à ce travail pédagogique. Et j'ai remarqué la différence : les enfants en veulent, ils parlent bien anglais, ils n’ont pas peur de moi et viennent me parler. J'ai vraiment été impressionnée.
Le directeur fait très souvent des allers retours à Chiang Mai ou à Bangkok  pour chercher des fonds pour améliorer son école : il a par exemple réussi à construire une petite bibliothèque, ce qui est génial.




Voila pour le fonctionnement des écoles et des foyers, très complexe, car j'en apprends tous les jours !

Concernant mes visites, j'ai toujours été occupée ! J’ai rencontré les professeurs, les responsables, et les enfants de chaque programme et j’ai aussi visité les villages que je ne connaissaient pas. J'ai joué avec les enfants dans les quelques écoles où ils ne sont pas trop timides, et j’ai donné des cours d'Anglais quelques fois. Durant mon temps libre j'écrivais tous mes rapports et j'organisais mes prochaines visites. Là où je dors, j'essaye aussi d'aider dans le quotidien : cuisine, entretien des jardins, rangement ... J’ai aussi passé pas mal de temps dans les rizières car c'était la période de la récolte ici : c’est vraiment super, mais épuisant ! 










Comme je vous en avais parlé, j'ai aussi pu faire le marshmallow challenge dans certains programmes. Les enfants étaient contents, et c’était vraiment intéressant de les voir s’atteler à la construction de leur pyramide. Je suis sûre qu’en France le jeu ne donnerait pas la même chose. Ici ils s’observent entre eux, pas un seul enfant ne crie ou ne parle fort, ils restent très calmes, et à la fin des 18 minutes, ils rigolent s’ils n’ont pas réussi.


Je découvre ma région et le peuple Karen au fur et à mesure de mon temps passé ici : c’est un peuple très réservé et très timide, ce qui n’est pas toujours facile. Ils sont très durs à comprendre et à cerner. Cependant, je rencontre des gens adorables : des villageois très pauvres m’invitent à manger et une dame m’a donné son gilet un soir où il faisait très froid : la gentillesse de certaines personnes est vraiment incroyable. Dans un de mes programmes, je dors chez les parents d’une filleule car je n’ai nulle part où loger à l’école. Ils sont très pauvres et j’ai vécu dans des conditions très précaires, mais ils sont tellement gentils. Plus les jours passent et plus je me rends compte du décalage de vie, mais aussi de pensée, entre ces peuples et nous. Oui il y a un énorme décalage sur le mode de vie, principalement dû à leurs croyances et à leur pauvreté, mais pas que. La patience, la gentillesse, la politesse sont des concepts tellement différents ici. Quelque chose qui nous paraîtra d'une impolitesse absolue pourra leur paraître banal, et vice versa. 







Concernant mes observations au niveau du travail, je souhaiterai maintenant travailler sur deux points.
Le premier concerne la formation des responsables locaux. En effet, ma mission ayant été délaissée, ils n’ont pas été informés des changements et n’ont pas eu de suivi pendant plusieurs mois. Certains d'entre eux sont donc perdus : ils ne comprennent pas tout, ne connaissent pas bien Enfants du Mékong, ou ne veulent pas s’impliquer à fond car avoir des responsabilités leur fait peur. 
J’en ai donc parlé avec mes responsables et nous comptons organiser une réunion de zone avec tous les responsables locaux en 2018. Cela permettra de leur expliquer beaucoup de choses et de les rassurer lors d'un événement officiel avec les équipes Enfants du Mékong. D'ici la se sera à moi de leur expliquer le maximum, petit à petit, et de leur donner envie de s'impliquer de plus en plus; 

Le deuxième gros point sur lequel je souhaiterais travailler est la distribution des parrainages aux enfants. En effet, comme je vous l’ai expliqué, les écoles et les foyers des montagnes ont très peu de moyens. Souvent, le parrainage individuel des enfants est donc divisé en deux : les enfants obtiennent entre 100 et 400 Baths, et le reste va a l’école ou au foyer afin de payer les frais : électricité, nourriture, eau, uniformes scolaires, personnel… Ce fonctionnement marchait bien autrefois, mais je trouve que cela n'est plus la meilleure chose à faire. 
En effet, lorsque les enfants vivent chez eux et non au foyer ou a l’internat de l’école, la somme qui leur ai donné (100 à 400 Baths) ne leur suffit pas du tout à vivre convenablement. 
Je voudrais donc que les enfants touchent leur parrainage en entier, soit 800 Baths. Et en parallèle, nous parrainerions les écoles ou foyers dans le besoin par des parrainages appelés parrainage collectifs.  
De même, j’en ai discuté avec mes responsables et nous allons mettre cela en place. Cela sera surement long car il faut trouver des parrains en France qui sont prêts à parrainer une école et non un enfant, et ce n'est pas facile. Mais selon moi c’est vraiment important afin que notre aide soit la plus efficace possible.

Voila pour mon retour du mois de novembre et toutes mes observations. D’ici fin Décembre, je retourne visiter 2 programmes dans lesquels il y a beaucoup de travail, et dès demain je me rends dans les camps de réfugiés. Je passe Noël à Maetho, puis je pars dans le Sud du Cambodge, à la plage, pour le nouvel an. Je ne vais pas que me prélasser au soleil, j’en profite aussi pour refaire mon visa. Je vous écrirai un nouvel article très bientôt pour vous raconter ma visite dans les camps de réfugiés !

Commentaires

Articles les plus consultés